IN/EX
TENTATIVE DE JEUX ET DE RÉFLEXIONS COLLECTIVE SUR LA NOTION DE DISPARITION MENÉE PAR LE UN
Réinventer un rapport au monde dans lequel nous vivons. C’est une tâche à laquelle Le UN s’active par son fonctionnement horizontal et non hiérarchique, par son engagement dans la réalisation artistique autant que dans l’organisation sociale de l’ensemble. Le UN, grand ensemble de 25 improvisateur·ice·s, se considère lui-même comme un écosystème. Dans les différents contextes de ses interventions, il entretient une interaction et un échange obstinés entre ce qui l’alimente et ce qui l’anime.
En 2021, l’orchestre faisait une première expérience de fabrication collective spontanée dont le théâtre fût un tronçon de la rivière Dordogne intitulée Méandre(s). Dans une logique de poétique de l’espace, Le UN poursuit en 2023 ses recherches le long de l’estuaire de la Gironde avec Rivage(s). Lors des phases d’exploration de ces lieux, Le UN improvise en lien avec eux. Les paysages traversés forment des haltes libres sonores. C’est le contexte qui est support d’expression. Durant cette résidence, Le UN et ses invité·e·s expérimentent, par l’improvisation, les matériaux collectés sur sites et inventent une fiction géographique de plateau, sonore et visuelle, des lieux traversés.
Le UN, Pointe du Verdon, octobre 2023, 7h
Ci dessous, des textes compilés d'Olivier Chadoin, Eric Chauvier et Claire Steimer qui nous ont accompagné durant ces expériences.
Un entretien à 4 voies avec ces 3 invité.e.s mené par David Chiesa est aussi téléchargeable ici
OLIVIER CHADOIN, sociologue : RIVAGES ET MÉANDRES
L'intégralité du texte est téléchargeable ici
Aborder le travail du UN depuis Méandres, jusqu’à Rivages, par les mots et la syntagmatique de ma discipline, la sociologie, serait sans doute l’enfermer et le réduire, rabattre de l’inconnu sur du connu. Ce qui traverse en effet la pratique de ces musiciens à mes yeux, c’est une forme d’indiscipline, de jeu sur les limites, une volonté de faire UN à partir des uns et des autres, mais surtout de faire du jeu musical en commun, en lien avec les éléments de nature, un moment de recherche. Recherche de liens avec un monde sensible et vécu, celui du fleuve. Une recherche en lien avec l’eau conçue comme support-surface d’une projection, d’expérimentation d’une résonance avec les éléments, d’un autre rapport au monde ; un type de relation du sujet au monde dans lequel l’un et l’autre se transforment mutuellement. Travailler avec les paysages, avec l’eau comme surface et support, chercher à résonner avec le vivant
Cette manière de « refaire des mondes », de tisser avec le grand paysage de la masse estuarienne ou de la rivière, somme des ruisseaux, évoque pour moi un ensemble de références et de notions qui sont autant d’échos et échanges entre la production du sensible et l’invention conceptuelle, depuis Elisée Reclus [...] Télécharger le texte
Dymaxion map, Buckminster Fuller, 1954
ERIC CHAUVIER, anthropologue : FICTIONS D'ESTUAIRE
L'intégralité du texte est téléchargeable ici
Le long de l’estuaire, nous marchons dans les roseaux, dans leur progéniture de déchets vivants – leurs éclats boueux, leurs souches détrempées, les sillons qu’ils ont façonnés.
D’où vient cette impression que les roseaux n’existent pas ?
Nous marchons dans les alluvions de l’estuaire. Mais l’« estuaire » n’existe pas. Pas totalement. Il est une dénomination insuffisante. Ici, aux confins de l’eau, toute parole semble devenir contingence, artifice. Sous le ciel qui vibre et se déchire, quelque chose précède le langage. Le désamorce.
« La terre très ancienne, indifférente aux êtres qui l’habitent, revêt une sublimité nouvelle ; le bruit blanc, ininterrompu des vagues, sans cesse reproduites, pourra dire désormais l’éternité du monde. »
Ce tableau d’une origine, décrit par l’historien Alain Corbin, précède les premières empreintes d’hominidés dans l’estuaire [...]
CLAIRE STEIMER, historienne : LE UN, RIVAGE(S)
L'intégralité du texte est téléchargeable ici
À l'invitation de l'ensemble musical Le UN, j'ai participé à "un projet de territoire autour de la fabrication collective spontanée". À la suite d'un travail mené sur la Dordogne, Méandre(s), réunissant un orchestre d’improvisateurs et d’improvisatrices (Le UN) et des chercheurs et chercheuses dans des domaines très différents, l'expérience a été poursuivie sur l'estuaire de la Gironde, avec pour ma part la participation à deux jours de création en immersion dans le secteur du Verdon-sur-Mer.
Cette commune a été étudiée dans le cadre d'un inventaire du patrimoine culturel des communes riveraines de l'estuaire de la Gironde, en 2012-2013. L'objectif de cette mission : "recenser, étudier et faire connaître" le patrimoine local dans toute sa diversité. Il s'agit de constituer un socle de connaissances fondé sur des recherches historiques et un travail de terrain qui allie observation, analyse et photographie [...]